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lace, naguère si audacieuse et si bruyante, était devenue craintive et silencieuse comme une bande de gamins en faute. Le contact des cadavres la glaçait et la faisait se taire.

Des factionnaires, pour éviter toute curiosité indécente, furent placés auprès des deux dépouilles, qui avaient été réunies dans une salle du rez-de-chaussée. À dix heures du soir, par les ordres de M. Clemenceau, les corps furent enlevés, mis en bière et déposés dans le caveau provisoire du petit cimetière de la commune de Montmartre, sur la Butte, près la rue des Saules et la place de l’Abreuvoir (aujourd’hui place Constantin-Pecqueur). Les restes de Clément Thomas furent, par la suite, transportés au Père-Lachaise. Un monument a été érigé, en exécution d’un décret de l’Assemblée Nationale.

EXPLICATIONS DE M. CLEMENCEAU

Toute une polémique s’étant élevée au sujet du rôle joué par le maire de Montmartre dans cette tragédie, celui-ci protesta contre certaines allégations du comte Beugnot dans le récit publié par le Soir, reproduit plus haut. M. Beugnot reprochait notamment à M. Clemenceau de n’avoir paru qu’à six heures du soir, après l’assassinat des deux généraux « qu’il aurait pu peut-être empêcher ».

M. Clemenceau répondit, dans une lettre communiquée à la presse, le 30 mars 1871 :

Je passai la journée du 18 mars à la mairie, où me retenaient de nombreux devoirs, dont le plus impérieux était de veiller sur les prisonniers qu’on m’avait amenés le matin. Il est inutile d’ajouter que je n’avais et ne pouvais avoir aucune connaissance des faits qui étaient en train de s’accomplir, et que rien ne pouvait faire prévoir.

J’ignorais absolument l’arrestation du général Clément Thomas, que, sur la foi des journaux, je croyais en Amérique.