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Beugnot, un personnage de la Restauration, célèbre pour avoir inventé le mot historique prêté au comte d’Artois, lors de la rentrée des Bourbons : « Il n’y a rien de changé en France, il n’y a qu’un Français de plus », mot d’ailleurs aussi inexact qu’apocryphe. Le comte Beugnot publia donc, dans le journal le Soir, un récit que le comte d’Hérisson a reproduit, dans son Nouveau Journal d’un Officier d’ordonnance.

M. Beugnot écrivit le 24 décembre 1888 à M. d’Hérisson, lui demandant des détails sur les événements de la rue des Rosiers :

Je ne puis mieux faire que de vous envoyer le récit de cette journée tel que je l’ai publié, au lendemain des événements, dans le journal le Soir, nos du 24 et du 25 mars 1871. Je n’ai rien à y ajouter, rien à y retrancher ; pour ce qui concerne la journée, c’est le récit exact et improvisé de ce qui s’est passé. J’aurais hésité à vous envoyer un document vieux de dix-huit ans, si je n’étais pas convaincu qu’il est peu connu. Le Soir, en effet, ne paraissait plus à Paris à cette époque. On l’imprimait à Versailles. C’était Le Moniteur de l’émigration, tiré sur une feuille volante, comme une affiche. Les numéros de cette période sont introuvables aujourd’hui. Je suis donc persuadé qu’aucun de vos lecteurs ne connaît mon récit, le voici :

« …nul ne peut raconter plus fidèlement que moi cette lugubre histoire, car j’ai assisté à toutes les péripéties de ce drame, qui remplira désormais une des plus sombres pages de notre histoire.

« J’ai été fait prisonnier par les insurgés, à neuf heures du matin, au haut du boulevard Magenta ; j’étais à cheval, accompagné d’une escorte de deux cavaliers, et chargé par le général Le Flô, ministre de la Guerre, d’explorer les quartiers de Belleville et de Montmartre, pour lui rendre compte de l’opération projetée de l’enlèvement des canons.

« Nous arrivâmes au Château-Rouge, et après avoir traversé le jardin, je fus amené au pavillon, où je devais rendre compte de ma conduite au Comité annoncé. On me fit attendre plus d’une demi-heure devant la porte ; une foule de gardes nationaux m’en-