Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/441

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

forces des généraux Susbielle et Paturel étaient suffisantes pour reprendre l’offensive, et, en attaquant la Butte à revers, Vinoy pouvait faire réoccuper les positions abandonnées. À Belleville, la division Faron jusqu’à onze heures demeura victorieuse sur ses positions. À cette heure-là seulement, le général se retira, sans d’ailleurs brûler une cartouche, ni donner un coup de baïonnette. Il reçut probablement l’ordre d’avoir à ramener ses troupes aux casernements. Le colonel Lespion fut seul entouré, et contraint de signer l’engagement de ne plus continuer son action. On le laissa reprendre la route de l’Hôtel-de-Ville, sain et sauf avec ses troupes intactes.

À onze heures du matin, les nouvelles de Montmartre étaient parvenues à Belleville, et les soldats de la division Faron pouvaient être gagnés par la démoralisation ambiante. Pourtant ces mêmes troupes, ramenées à Versailles, furent par la suite des plus solides, et ne montrèrent pas un instant l’intention de faire défection. Mais on peut admettre que les généraux Faron, La Mariouse, Maud’huy, Henrion, qui occupaient tout l’est parisien, craignirent de voir la contagion entamer leurs troupes et se hâtèrent de les soustraire au contact de la foule, de plus en plus épaisse, mais toujours inoffensive, fraternelle.

Thiers ne pouvait supposer que les troupes ne tiendraient pas. Il ne se doutait pas de la persuasion de la foule. Il devait donc se garder contre l’éventualité d’une victoire trop prompte, et trop décisive. C’est pourquoi il ménagea les arrondissements les plus ardents, toute cette rive gauche turbulente, où Duval et Henry tenaient leurs bataillons en haleine, signaient des ordres, mettaient leurs principales positions en état de défense. Il dut penser que les événements de Montmartre et de Belleville auraient là leur répercussion, et que le maximum de résistance qu’il prévoyait,