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leurs officiers, les chasseurs mirent donc en joue. Les gardes nationaux aussitôt reculèrent, cherchèrent à s’abriter. Les femmes s’étaient sauvées avec leurs enfants. Les gardes nationaux reformèrent bientôt leur colonne, mais en écartant les femmes, marchant résolument vers les chasseurs, à la baïonnette. Un renfort leur était venu. Les soldats enfermés dans la tour Solferino, sur l’ordre de Lecomte, avaient été délivrés, et s’étaient mêlés aux hommes du 169e. Les factionnaires et les gardiens des canons, faits prisonniers au début de l’attaque, et gardés dans le poste de la rue des Rosiers, avaient de même été mis en liberté, et venaient renforcer la colonne d’assaut. Les chasseurs, en présence de ces forces, renoncèrent à une résistance qu’ils n’entreprenaient point de grand cœur, et à leur tour ils levèrent la crosse en l’air. C’était fini partout, et les Buttes, avec le retour offensif de la garde nationale, et grâce à la défection du 88e, étaient reprises. Ces gardes républicains, et les sergents de ville, désarmés et entourés par les hommes du 88e et les gardes nationaux, furent conduits à la mairie de Montmartre, et laissés à la garde du maire Clemenceau. On exigea du général Lecomte qu’il donnât l’ordre aux troupes lui obéissant encore d’évacuer les Buttes. Le général s’empressa de déférer à cette sommation. Il écrivit l’ordre au crayon, qui fut immédiatement portaux troupes attendant rue des Rosiers et rue du Mont-Cenis. Energique, et même violent au commencement de l’attaque, le général Lecomte faiblit alors ; à partir de ce moment, il apparaît démoralisé et craintif. Son attitude jusqu’à la fin n’aura rien d’héroïque. Al est vrai que sa situation est affreuse. Abandonné par ses soldats, vaincu sans avoir combattu, humilié et déprimé, il se voit au milieu d’une foule furieuse qui le menace et l’injurie. On le prend pour Vinoy. Les gardes nationaux ont beaucoup de peine à