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Je suis partie, dit-elle, avec les compagnies de marche de la Commune, dès la première sortie. Je faisais partie du bataillon de Montmartre, et je me suis battue dans ses rangs, Comme un soldat. J’ai pensé qu’en conscience c’était ce qu’il y avait de plus utile à faire. J’ai nécessairement continué dans Paris, comme les autres, jusqu’à ce que les vainqueurs ayant arrêté ma mère pour la fusiller à ma place, je suis allée la faire mettre en liberté, malgré elle, en réclamant cette place pour moi.

Ce fut son unique réclamation : elle ne sollicita ni pitié, ni indulgence pour elle-même. Les juges n’osèrent lui accorder la mort qu’elle attendait. Peut-être, au fond de leur cœur de soldats, y avait-il de l’admiration, et un peu de sympathie pour cette femme, dont on attestait d’autre part la douceur, la charité, l’extrême bonté, et qui les avait si crânement combattus, le fusil à la main. Ils firent grâce de la vie, et envoyèrent l’héroïne en Calédonie. Condamnée à la déportation dans une enceinte fortifiée, Louise Michel partagea l’existence pénible des hôtes de la presqu’île Ducos. Elle inspira à tous ces hommes admiration et respect. À l’amnistie, elle revint en France, se remit à faire des conférences, à continuer sa propagande socialiste, d’autant plus énergique. Menacée d’arrestation, à la suite d’un mouvement de grévistes, où des boulangeries avaient été sur le point d’être pillées, elle se réfugia à Londres. Elle y séjourna dix-sept ans, puis revint en France, les médecins lui ayant prescrit le climat du Midi. Anémiée par le ciel froid et l’air humide de l’Angleterre, elle vint chercher la cure de soleil à Toulon. Elle faillit y mourir en arrivant. Elle réchappa cependant, et vécut encore un an. En tournée de conférences, dans les Alpes, elle fut atteinte d’une pneumonie double. Elle expira, le 9 janvier 1905, à Marseille, chez son amie, Mme veuve Légier, boulevard Dugommier, chez qui elle avait demandé à être transportée. Le