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habitants et à la garde nationale. Le maire de Montmartre, Clemenceau, n’avait même pas été avisé. Le gouvernement avait lâché des troupes, comme des chiens de garde qu’on démusèle, sans avertir les passants. En même temps qu’il demandait aux gardes nationaux de restituer leurs canons, et avant qu’ils aient eu le temps de répondre, il se mettait en mesure de les leur prendre.

Pendant l’affichage de cette proclamation, le commandant en chef de la garde nationale faisait apposer un autre placard, alors au moins prématuré, et qui parut singulièrement tardif quand on put le lire. Les afficheurs nocturnes n’avaient pas fini leur tâche que les faits donnaient le plus énergique démenti à l’affirmation téméraire du général d’Aurelle de Paladines disant :

Une proclamation du chef du pouvoir exécutif va paraître, et sera affichée sur les murs de Paris, pour expliquer le but des mouvements qui s’opèrent. Ce but est l’affermissement de la République, la répression de toute tentative de désordre, et la reprise des canons qui effraient la population. Les buttes Montmartre sont prises et occupées par nos troupes, ainsi que les buttes Chaumont et de Belleville. Les canons de Montmartre, des buttes Chaumont et de Belleville sont au pouvoir du Gouvernement de la République.

D’Aurelle de paladines.

Ceci ressemblait aux procédés hasardeux de certains journalistes, rédigeant à l’avance le compte-rendu d’une cérémonie, au dernier moment décommandée.

À l’heure même où d’Aurelle de Paladines annonçait triomphalement que « les canons de Montmartre étaient au pouvoir du gouvernement », Lecomte et ses troupes se trouvaient en pleine déroute, les canons étaient repris, et ce général était prisonnier.