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des faits accomplis. Elle s’adressait aux commerçants, aux boutiquiers, à ceux que l’on supposait être « partisans de l’ordre », elle essayait de ranger du côté des provocateurs les habitants du centre, dont les bataillons avaient défendu le gouvernement au 31 octobre et au 22 janvier, et le souvenir de leur concours d’alors était évoqué. Mais les temps étaient changés, et ces bataillons ne paraissaient guère disposés à soutenir ces hommes néfastes du 4 septembre, qu’ils chargeaient de leur haine et de leur mépris, puisqu’ils n’avaient pas rempli la mission qu’ils s’étaient donnée, et qu’impuissants à chasser les Prussiens ils leur avaient ouvert Paris et livré la province. L’appel aux intérêts, comme aux frayeurs de la bourgeoisie, ne devait pas être entendu.

On remarquera l’aveu fait par le gouvernement « qu’il aurait déjà pu reprendre les canons ». C’était vrai, mais la proclamation n’ajoutait pas que, si l’on n’avait pas voulu opérer sérieusement cette reprise, ce n’était point pour permettre « aux hommes trompés de se séparer de ceux qui les trompaient », mais bien pour attendre des renforts et frapper un coup violent.

Louis-Napoléon avait dit aux Parisiens, dans la nuit du Deux-Décembre : « Que les méchants tremblent, et que les bons se rassurent » : Thiers et ses ministres, en adjurant les bons citoyens de se séparer des mauvais, demeuraient dans la même équivoque, mais ce langage était parfaitement intelligible pour le général Vinoy et pour l’ancien gendarme Valentin.

La menace de « recourir à la Force » était une formule bien inutile, puisque le gouvernement ne menaçait plus, puisqu’il agissait. On doit même constater qu’il avait agi sans avoir menacé, car aucune sommation, directe et formelle, n’avait été adressée aux bataillons de Montmartre, pas plus qu’aux