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une académie de philosophes socialistes, jusqu’à notre époque. Ils pouvaient bien, dans leurs congrès, et encore au milieu de vives résistances, proclamer la révolution sociale universelle, abolir la propriété individuelle, supprimer l’héritage, décréter la production en commun, l’abolition du salariat, et la cessation des guerres, ils étaient impuissants à faire admettre leurs conceptions par l’ensemble des peuples, encore moins à faire passer le moindre article de leur programme minimum de la théorie à la pratique. L’Association internationale devait effrayer, à distance et par out dire, les gouvernants ; elle n’en attaqua sérieusement aucun. Lorsque le conflit terrible de 70 s’éleva entre Allemands et Français, elle comptait des adhérents nombreux dans les deux camps. Elle n’en désarma pas un. Les internationaux, et c’est à leur honneur des deux côtés des Vosges, firent le coup de feu avec une passive énergie. Sauf quelques phraseurs, qui, du fond de leur cabinet, lancèrent des appels creux et vains, au nom de l’humanité et de la fraternité philosophique et ouvrière, nul ne parut se souvenir des belles maximes anti-guerrières de l’association. Pour la guerre civile, en France, l’élément dit international ne fut qu’un appoint plutôt doctrinal, une adhésion bavarde, et encore rencontra-t-on surtout des internationaux dans les conseils élus, dans les grandes fonctions, dans les services administratifs, dans les journaux et dans les clubs. Les vaillants qui furent mitraillés dans les plaines de Nanterre le 2 avril les combattants d’Issy, de Vanves, du Moulin-Saquet, les intrépides défenseurs des suprêmes barricades de mai avaient-ils adhéré aux statuts de l’Association internationale ? les connaissaient-ils même ? C’est fort possible, mais ils n’en parurent guère préoccupés avant et pendant la bataille. Ce n’était pas l’internationale qui les avait armés, ce n’était pas elle qu’ils défendaient. La