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réunions publiques. On ne leur ménageait ni les reproches ni les dédains, on les accablait de méfiance et de suspicions. On les chansonnait aussi, sur l’air alors populaire de la Femme à Barbe, que dégoisait à l’Alcazar Thérésa, la divette populaire. Raoul Rigault colportait dans les brasseries du Quartier latin des couplets où chacun des anciens Cinq venait se présenter au pilori : « C’est moi qui fais les boniments sur l’avant-scène de la baraque ! » faisait-on dire à Jules Favre, et Pelletan, Jules Simon, chacun à son tour, faisaient amende honorable devant l’auditoire en déclarant au refrain : « Et ça ne coûte qu’un petit parjure ! » La chansonnette s’appelait : la Bande à Judas. Elle eut un vif succès. Ainsi, bien avant le 4 Septembre, où ils prirent le pouvoir, en véritables insurgés, vainqueurs sans avoir combattu, il est vrai, et à la faveur de l’immense désarroi et de la stupeur produite par les désastres, ces hommes qui formèrent le gouvernement de la Défense, et qui aidèrent Thiers et Mac-Mahon à exterminer les républicains parisiens, étaient déjà désavoués, démonétisés et honnis. L’épithète de Judas était sans doute excessive, et surtout prématurée, mais elle témoignait de l’hostilité à leur égard des groupes avancés. Ils avaient été au-devant de l’impopularité. Ils avaient repoussé avec hauteur l’offre d’une discussion publique et contradictoire avec les orateurs populaires. Ils partageaient les sentiments du parquet à l’égard des membres de l’Internationale.

RÔLE DE L’INTERNATIONALE

C’était visiblement alors à une révolution que la France courait, et non à une réforme, comme l’espérait Émile Ollivier, grisé par ses formules et aveuglé par ses illusions. Nul n’en doutait, et l’empereur moins que personne. On