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ou religieuses continuent à être soumises à cette autorisation. »

C’était la formule de Figaro, mise en texte législatif : il était permis de parler de tout, sauf de ceci, de cela, et l’énumération prohibitive équivalait à l’interdiction complète de parler. Il est évident que si l’on permettait aux gens de se réunir pour discuter, pour entendre des discours, c’était bien pour qu’ils pussent traiter les brûlantes questions politiques et sociales, qui les intéressaient par-dessus tout. Rouvrir les clubs, et défendre d’y parler de politique, c’était aussi absurde et aussi perfide que la tentation de la légende adamique. Si le Tout-puissant n’avait pas voulu qu’Ève croquât la pomme, il n’avait qu’à ne pas la laisser entrer dans le jardin où il y avait des pommiers. Le fruit défendu fait venir l’eau à la bouche, les paroles aussi. Il était plus que probable que les orateurs populaires, à qui le bon dieu des Tuileries ouvrait les salles publiques, jusque-là cadenassées, en leur permettant, une fois rassemblés et entraînés par la présence d’auditeurs passionnés, de toucher à tous les sujets, excepté à la politique et à la religion, s’empresseraient de toucher à ces deux matières interdites. Il autorisait la réunion et interdisait ce qui devait déterminer les hommes à se réunir. Il était facile de prévoir que les orateurs ne résisteraient pas à la tentation, et qu’abordant les sujets défendus ils tomberaient sous le coup de la loi : ils deviendraient inévitablement des délinquants. Cette loi n’était donc qu’une embûche. Elle était ainsi dolosive et mensongère. Si, en effet, l’article Ier, sous les conditions sus-indiquées, permettait de se réunir sans autorisation, l’article 13 et dernier donnait le droit au préfet d’ajourner, au ministre de l’Intérieur d’interdire toute réunion. C’était la négation même de la réunion. Le droit était nié après avoir été affirmé, la possibilité de se