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s’affaiblissait tous les jours dans les classes ouvrières. Nous maintenons qu’après douze ans de patience le moment opportun est venu. En 1848, l’élection d’ouvriers consacra un fait, l’égalité politique ; en 1864, cette élection, consacrerait l’égalité sociale.

Ce manifeste, d’une forme modérée, — Tolain en avait été le rédacteur — souleva la fureur des députés, déchaîna les colères de la presse, et excita contre les novateurs toute l’arrière-garde de l’opposition. On reprocha à ces néo-opposants, avant-garde compromettante, de faire avec la question sociale, inopportunément agitée, une diversion favorable aux candidats officiels, nuisible aux candidats d’opposition, hostile aux chefs de la gauche. On les considéra presque comme des traîtres et des mouchards. Mais ils eurent l’approbation de Proudhon, dont malheureusement la fin était prochaine. Le puissant philosophe publia alors son ouvrage remarquable Sur la Capacité des classes ouvrières.

La déclaration ouvrière eut une sanction pratique : la loi dite des coalitions]fut votée, après un brillant effort oratoire d’Émile Ollivier. C’était l’abrogation des dispositions du code pénal, punissant l’entente des ouvriers en vue d’une grève à déclarer. Émile Ollivier proposa, et fit voter, la liberté pour Îles travailleurs de se concerter, avec cette restriction que la liberté de celui qui ne voudrait, ni se coaliser, ni cesser le travail, serait respectée. Un article amena une discussion assez vive. Jules Favre et Jules Simon combattirent le texte visant les atteintes à la liberté du travail. Émile Ollivier répondit :

S’interdire à soi-même le travail est un acte de liberté, l’interdire aux autres est un acte de tyrannie : la loi permet l’acte de liberté et réprime l’acte de tyrannie.

Cette loi autorisait les grèves, mais comme elle conti-