Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/300

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il y eut plusieurs de ces simulacres d’enlèvement.

Le Mot d’Ordre, jeudi 9 mars, avait fait le récit d’une de ces fausses attaques ;

Hier, dans la soirée, un bataillon de la ligne gravissait lentement la rue des Martyrs, se dirigeant vers les buttes Montmartre. Le 116e bataillon de la garde nationale se réunit immédiatement et vint s’interposer pour arrêter les soldats.

Après plusieurs allées et venues de la rue des Martyrs à l’avenue Trudaine, les lignards ont arrêté leur marche ascendante, et, grâce aux citoyens du 116e bataillon, une collision, a été évitée entre la troupe régulière et la garde nationale.

Donc affaire manquée. Les troupes envoyées par Thiers pour prendre des canons se replièrent en bon ordre. L’intervention des gardes nationaux du bataillon d’un quartier très modéré (Saint-Georges), composé en grande partie d’artistes, avait suffi pour décider un bataillon d’infanterie à faire demi-tour. Il est certain que des ordres très rigoureux n’avaient pas été donnés pour cette attaque en plein jour. L’envoi d’un bataillon de ligne était excessif, si l’on était assuré qu’il n’y aurait pas de résistance, c’était une force dérisoire si Montmartre se levait, faisait mine de se défendre, et mitraillait les assaillants. On remarquera qu’il n’y avait ni attelages ni prolonges. Comment les lignards eussent-ils descendu de la Butte les canons ? de quelle façon auraient-ils pu les emmener, si le bataillon du 116e les avait laissés passer ?

Les hommes du 116e, bataillon bourgeois s’il s’en fut, et qui s’était d’ailleurs très bien comporté à Buzenval, sous les ordres de son chef, le vaillant colonel Langlois, qui y fut blessé, n’auraient sans doute pas engagé le feu contre la ligne, si la troupe avait avancé. Mais il n’ÿ avait là qu’une démonstration. Il s’agissait, non pas de prendre les canons, mais d’avertir ceux qui les gardaient qu’on pourrait les