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que de la milice parisienne. La garde nationale existait sous Louis-Philippe, sous l’empire, rien ne devait s’opposer à ce qu’elle fût maintenue sous la troisième République, avec des modifications raisonnables, et une organisation plus démocratique.

Cet accord pouvait se proposer, se discuter et devait finalement s’établir. M. Thiers n’en voulut pas. S’il y avait accord, les chances d’émeute s’évanouissaient, et la société n’avait plus à être sauvée. Dans ce cas, Thiers perdait son prestige, ne paraissait plus l’homme providentiel, n’était plus le président indispensable, celui qu’on ne pouvait songer à remplacer, sans risquer les pires aventures. Il se retrouverait aux prises avec une assemblée divisée et difficile. Il aurait son trône présidentiel ballotté entre une majorité incapable de faire la monarchie, mais la voulant, et une minorité turbulente, bien près de devenir factieuse. Les groupes avancés existant dans le pays ne tarderaient pas à réclamer, et peut-être à imposer, une république non pas libérale et bourgeoise, mais radicale et même socialiste. C’est à éviter ce danger que tendait son plan.

S’il ne voulait pas d’use conciliation avant le 18 mars, et l’on verra qu’après cette date, lors de la résistance des maires au Comité Central, il se montra également rebelle à toute transaction, M. Tiers ne désirait nullement s’emparer, par surprise et sans combat, des fameux canons. Il ne voulait tenir les canons ni d’une transaction, ni d’un coup de main heureux. Si Paris, en s’éveillant, apprenait que, dans la nuit, ces redoutes qu’on désignait comme si formidables, que ces positions terrifiantes avaient été occupées, Sans qu’une cartouche fût tirée, il perdrait le mérite d’avoir vaincu la révolution menaçante. Et puis, la déception et le découragement s’empareraient des révolutionnaires. Ils renonceraient, pour le moment, à toute action