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ils s’étaient fait voir à la foule, rassemblée sur la place Saint-Germain-l’Auxerrois, que des gardes nationaux gardaient. Aperçus, ces officiers avaient été hués, et s’étaient en hâte retirés. Mais beaucoup de leurs camarades se promettaient, sans se montrer aux fenêtres du Louvre, de jeter aussi leur coup d’œil sur ce Paris, dont ils ne pouvaient fouler que le seuil. Ils pensaient pouvoir faire, à tour de rôle, cette excursion tentante. Des ordres avaient déjà été donnés pour que tous les hommes du corps d’occupation pussent venir loger et camper dans les Champs-Élysées, remplaçant, chaque jour, les troupes introduites la veille, et ayant passé la nuit dans Paris. Tous ces projets furent renversés par la rapidité avec laquelle l’Assemblée avait ratifié les préliminaires. La déception allemande fut vive. L’empereur fut particulièrement vexé de ce vote si prompt, qui le privait d’une orgueilleuse satisfaction qu’ils était promise. Il comptait personnellement entrer dans Paris, à la tête de la garde prussienne, et il avait ordonné une revue qui serait passée, dans les Champs-Élysées et au rond-point de l’Étoile, pour le lendemain vendredi 3 mars. À cheval sous l’Arc-de-Triomphe, Guillaume eût goûté la joie superbe d’être acclamé, dans Paris, par ses troupes fièrement alignées dans la capitale des Français. C’eût été, pour lui, le complément de la proclamation de l’empire d’Allemagne, dans le salon des Glaces, au Palais de Versailles, la véritable cérémonie du sacre, son couronnement, par ses légions victorieuses, dans Paris vaincu.

Le vendredi 3 mars ne vit pas cette apothéose. Ce jour-là même, en vertu des conventions et du vote de l’Assemblée Nationale, dont le procès-verbal avait été remis la veille par Thiers, revenu de Bordeaux, l’ordre d’évacuation était donné aux troupes, et le mouvement de retraite commençait.