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fusil ne partit et aucune occasion de conflit ne se produisit.

Un officier d’ordonnance de Trochu, le comte d’Hérisson, qui a assisté à l’entrée des troupes, en a donné le récit suivant :

Dès le matin, on avait jeté un double pont de bateaux au-dessous du pont de Saint-Cloud, unautre à Suresnes, et un troisième près de Billancourt.

Par ces trois ponts, 30,000 hommes avaient passé et s’étaient massés sur la piste de Longchamps, en face des tribunes vides, sur trois lignes : une ligne d’infanterie en colonne de bataillon, une ligne de cavalerie en colonne d’escadron, avec artillerie sur les flancs, et une ligne de services auxiliaires et d’ambulances. Les troupes avaient déjeuné sur le terrain, les fantassins derrière leurs faisceaux, et les cavaliers à la tête de leurs chevaux.

À dix heures et demie, le Kronprinz, à la tête d’un nombreux état-major, avait passe sur le front, salué par des hurrahs prolongés.

À onze heures moins dix, le cri : Le Roi, Kœnig ! avait retenti, les lèvres prussiennes n’étant pas encore dressées au mot : Kaiser, l’Empereur ! et on avait vu déboucher la voiture de l’Empereur, précédée de piqueurs et attelée en daumont de quatre purs sang. Derrière la tribune, l’Empereur descendit de voiture, monta à cheval, et, en grand costume de général prussien, avec le casque à crinière blanche et l’écharpe. il déboucha sur la plaine de Longchamps, vers le moulin, où il fut reçu par son fils.

À ce moment, sur toute la ligne, les musiques entonnèrent l’hymne national : « Salut à toi, couronné par la victoire ! » Escorté par un état-major de plus de six cents officiers, il galopa devant les trois lignes de l’armée, puis il vint s’adosser à la tribune impériale, déserte comme toutes les autres. Le prince royal alla se mettre à la tête de l’armée, et le défilé commença, au milieu des hurrahs ininterrompus.

Le comte de Bismarck était au milieu de l’état-major, confondu avec les officiers, en uniforme de cuirassier, avec le casque d’acier, mais sans cuirasse.

Après avoir défilé devant l’empereur, chaque régiment prenait le chemin de l’.Vrc-de-Triomphe, musique en tête. Les Prussiens,