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et révolutionnaire à la fois. Elle sert de monument funéraire aux morts des journées de juillet 1830, et du 24 février ; elle perpétue aussi le souvenir de la fameuse et initiale victoire du peuple au 14 juillet 1789.

Elle se dresse en effet sur l’emplacement de la Bastille royale. Le sentiment populaire a ajouté, bien que cette colonne eût été inaugurée en 1840, sous le règne de Louis-Philippe par conséquent, le caractère d’un hommage aux combattants de février 48. Pour beaucoup, elle personnifie la République et le suffrage universel bien que les glorieux de 1830 n’aient eu ni l’une ni l’autre pour prix de leur sacrifice.

L’anniversaire de la victoire populaire du 24 février 48 parut aux délégués du Waux-Hall l’occasion d’une démonstration impressionnante en faveur de la République, d’une manifestation imposante aussi contre l’entrée des Prussiens. Comme l’exprimait énergiquement l’ordre du jour voté au Waux-Hall, la Garde Nationale affirmait sa volonté de s’opposer par la force à la pénétration de l’armée allemande dans Paris. Ces dispositions devaient par la suite se trouver modifiées, sagement.

Ce fut, durant les journées des 24, 25, 26 février, dans une fièvre communicative et avec un enthousiasme contagieux, une farandole grave, une ronde majestueuse autour de la colonne. Tous les rangs sociaux se trouvaient confondus et égalisés dans cette spirale républicaine. Le peuple, à qui des symboles, des emblèmes comme les drapeaux, les écharpes, les insignes, sont nécessaires pour l’élan, pour l’action, après avoir, pendant les jours noirs du siège, stationné et formé le cercle, par groupes successifs, autour de la statue de Strasbourg, pince de la Concorde, personnifiant la Patrie, entourait désormais de ses anneaux vivante la colonne de Juillet, personnifiant la République.