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discours, interrompu par l’incident et le vote de la motion Allain-Tarçé, Victor Hugo monte à la tribune.

Le grand poète prononce un éloquent discours, aux phrases sonores, aux antithèses vibrantes. Il proteste contre la conquête :

L’Alsace, la Lorraine resteront françaises, quoi qu’il advienne, et quant à la France, elle n’abandonnera rien de son droit et de son devoir, qui est de garder l’Alsace et la Lorraine.

Dans l’abondante phraséologie de ce morceau oratoire, il y a de la philosophie, de la critique, de la prophétie, et aussi de l’utopie humanitaire avec de la chimère fraternitaire.

Un très beau passage à citer :

Une paix honteuse est une paix terrible. Que sortira-t-il de là ? La haine, non contre les peuples, mais contre les rois qui récolteront ce qu’ils auront semé. Les rois endiguent la conscience universelle. Ce que la France perdra, la Révolution le stagnera ! Bientôt l’heure viendra. Dés demain la France n’aura plus qu’une pensée, se reconstituer, reprendre ses forces, ramasser son énergie, nourrir de saintes colères, élever sa génération, ses petits deviendront grands, former une armée qui sera un peuple tout entier, travailler sans relâche, étudier les procédés et la science de nos ennemis, redevenir la grande France, la France de 1792, la France de l’idée avec l’épée…

Et puis un jour elle se dressera irrésistible. Elle ressaisira la Lorraine et l’Alsace !…

Jusque-là c’était admirable, et juste. La voix du grand poète était la voix même de la Patrie. Il dictait au pays le Décalogue du patriotisme.

Mais, emporté par son impétuosité, par sa verve débordante, dans une sorte de délire lyrique, Victor Hugo ajouta :