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de survie, sans escompte de l’internement protecteur ; la guerre des rues et des haies, des maisons et des chemins creux ; celle où les vieux capitaines frissonnent devant les vieilles femmes lançant leurs chaudrons du haut des toits, où la jeune fille accorte, avec un sourire, verse à l’envahisseur la boisson qui empoisonne, où l’enfant se glisse à quatre pattes sous des caissons, une mèche entre les doigts, et provoque, comme en se jouant, l’explosion du parc d’artillerie ; la guerre des guérillas, et des partisans, celle qui fait reculer les grenadiers devant les moines, et dont le souvenir emplit la tente pavoisée des conquérants de ces visions tragiques : les torches de Moscou, les tromblons de Saragosse, et le fossé de Querétaro.

Oui, la guerre, en février 1871, pouvait être continuée, mais à la condition de la faire autrement qu’en août 1870. Il fallait renoncer à la stratégie classique, et ne plus compter sur les tactiques enseignées aux écoles militaires. Plus de grandes armées, capables de gagner de grandes batailles, mais susceptibles aussi de se disloquer dans le désordre des grandes paniques. Nous ne pouvions disposer que de régiments improvisés, avec des recrues non exercées, conduits par des officiers novices, incapables de tenir en rase campagne contre des armées organisées, disciplinées, aguerries et entraînées par six mois de combats victorieux. Les hostilités devaient être reprises, mais avec de petits corps mobiles, épars et intrépides. Des soldats devenus des insurgés, harcelant sans relâche l’ennemi, interceptant ses convois, l’obligeant à livrer vingt batailles pour prendre un village, pour s’emparer d’un pont, pour franchir un défilé, c’était la bonne manière pour se débarrasser des Allemands en détail. On eût prolongé la guerre, s’il le fallait, jusqu’au printemps, jusqu’à l’automne, jusqu’à la retraite de l’ennemi ou son épuisement total. À moins que toute l’Alle-