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l’Académie d’Aix. Le jeune étudiant, pour avoir plus de chances de réussite, écrivit deux mémoires, en ayant le double soin de traiter le sujet d’une façon différente, et aussi de changer l’écriture. Il obtint le prix et l’accessit. Voilà qui promettait un gaillard âpre à la renommée, avide du butin de la gloire, et ne négligeant rien pour les acquérir. Son droit achevé, il vint à Paris, se lia avec Mignet, connut Manuel, et, par ce dernier, entra au Constitutionnel. Là, protégé par le banquier Laffitte, il devint un des brillants publicistes de l’opposition. Ses facultés de vulgarisation, d’improvisation, dont, par la suite, il devait fournir tant de preuves à la tribune et aux affaires, le servirent à souhait dans le journalisme. Animé d’une fièvre de travail extraordinaire, le jeune publiciste, en sortant du journal, s’attablait à une œuvre de longue haleine : l’Histoire de la Révolution Française.

Cet ouvrage est loin d’être parfait. Il a été depuis dépassé, et l’on possède sur la même époque des histoires plus vibrantes, plus passionnées, plus sincères, plus hautes de conception et d’exécution, d’une philosophie supérieure aussi. C’était surtout une nomenclature de faits, son travail comportant une analyse du Moniteur, et un résumé des séances, avec une description, minutieuse et souvent fastidieuse, des opérations militaires. Mais les événements de la Révolution étaient rarement dénaturés. Si l’esprit et les opinions de M. Thiers alors le rapprochaient des hommes de 89, des Girondins, il ne fut pas, de parti pris, hostile aux Montagnards. Il ne fit pas des Robespierre et des Saint-Just des démons, ni des thermidoriens des anges. Les volumes de la Révolution Française eurent un vif succès. Cet ouvrage fit mieux connaître les révolutionnaires, contribua certainement à leur grandissement devant la postérité, et détruisit, dans l’opinion bourgeoise, beaucoup