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économiques et aux inégalités légales qui retardent son industrie et paralysent l’usage intégral de ses forces physiques et intellectuelles. Une rêverie sans doute !… une chimère évidemment ! Mais ces utopies-là, bien que rien d’actuel ne puisse en faire présager la réalisation prochaine, sont-elles indignes de l’examen de l’Histoire ? La plus extraordinaire songerie, folie véritable aux yeux d’un sage de l’antiquité, d’un philosophe d’Athènes, d’un législateur de Rome, d’un clerc du temps de Charlemagne, d’un écrivain du xviie siècle, d’un marquis de la Régence, même d’un député du Tiers avant le 4 mai 1789, n’eût-elle pas consiste à évoquer une époque où il n’y aurait plus d’esclaves ni de sujets ? un pays où des marchands, des paysans, des artisans, non seulement nommeraient leurs chefs, mais encore pourraient être élus chefs eux-mêmes ? Qui aurait pu s’imaginer, même sous Louis XVI, qu’un jour viendrait où les ouvriers pourraient exercer la puissance législative, auraient le privilège neuf et inouï de discuter les heures de travail, le montant des salaires, et oseraient réclamer, comme un droit, la participation aux bénéfices, en attendant le partage des instruments de production de la richesse ? Cette rêverie-là est devenue la réalité. Qui sait de quels nouveaux rêves réalisés sera fait Demain ?

La plupart des contemporains n’ont voulu voir, dans les faits du 18 mars et des journées qui suivirent, que des convulsions. La Commune a été considérée comme une attaque épileptique de la population parisienne, un accès consécutif à la fièvre obsidionale. On lui a, jusqu’à présent, dénié le Caractère d’une grande évolution historique.

Cela tient à sa trop courte durée. Il ne lui a pas été