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attendant qu’un pouvoir nouveau fût constitué, le véritable pouvoir légitime décidant des destinées de la France, les membres du gouvernement et les ministres resteraient à leur poste, jusqu’à ce qu’ils en aient été régulièrement relevés. Il annonça ensuite qu’il demandait la permission de retourner à Paris, où il devait continuer de délicates négociations avec l’ennemi. Il insista pour que le renouvellement de l’armistice fût le plus court possible :

Nous ne devons pas perdre une minute, nous ne devons pas oublier nos malheureuses populations. Soyez sûrs que leurs larmes, leurs sacrifices, pèsent lourdement, je ne dirai pas sur ma conscience, car, devant Dieu, je suis innocent ; mais sur ma responsabilité, et je n’ai d’autre hâte que d’arriver au terme de ces misères.

Un mouvement d’assentiment suivit ces paroles équivoques. On se comprenait à demi mot. Il s’agissait de bâcler la paix. Quand Jules Favre disait pompeusement : « La France est prête, quoi qu’il arrive, à faire courageusement son devoir », ce n’était qu’une formule sonore. Le devoir, pour lui, pour le gouvernement, pour la majorité, c’était de déposer les armes avant tout, et de ne pas parler de les reprendre.

La séance d’ouverture se termina par un scandale. Garibaldi avait insisté pour parler, pour expliquer sa démission. La majorité refusa d’entendre l’illustre général, qui avait pourtant connu la victoire et vaillamment justifié le commandement qui lui avait été confié. On n’eut pas davantage égard à la quadruple élection dont il venait d’être honoré : « Il n’est plus député, puisqu’il a démissionné ! » crièrent quelques énergumènes royalistes, qui voyaient surtout, dans le brave chef des chemises rouges, le sabre de la révolution. Les tribunes protestèrent contre l’intolérance et l’injustice des hobereaux déchaînés. Il était évident que