Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/17

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La Commune n’est pas classée comme une Révolution. Les émeutes qui n’ont pas réussi, c’est-à-dire, n’avant pas servi de point de départ à une nouvelle organisation politique, ou ne s’étant point terminées en queue de réorganisation républicaine, dynastique ou constitutionnelle, sont appelées des insurrections, qualification péjorative. Le, 18 mars n’a pas eu droit, jusqu’ici, à une autre désignation. L’histoire a son étiquette et use d’un langage protocolaire. Elle salue Majestés les soldats parvenus, et proclame Grands Citoyens les insurgés heureux.

Ainsi, jusqu’à présent, les hommes de la Commune ne sont pas admis dans le nobiliaire démocratique. Danton a sa statue, et Marat, longtemps discuté, repoussé, excommunié, bientôt réhabilité et admiré même, sommeillera dans sa baignoire de bronze sous l’œil vaguement respectueux des foules indifférentes, parmi les massifs fleuris d’un de nos jardins publics. Mais Charles Delescluze et ses compagnons de lutte populaire, pour longtemps encore, seront exclus des honneurs posthumes. Leur tour probablement viendra. On les portera sur le socle d’égalité monumentale, à côté des « Géants de 93 ». Ils se dresseront dans la gloire du marbre et du métal, comme leurs confrères en révolution.

Alors ils bénéficieront d’une illusion d’optique. Le recul du temps, et l’enthousiasme suggéré par les livres, par les discours, par les légendes, différant des écrits et des récits ayant en cours jusqu’ici, les feront, à leur tour, paraître plus hauts et plus superbes qu’ils ne le furent dans la réalité. Ainsi les guerriers homériques, les sénateurs de Rome, les chevaliers du roi Arthur, les paladins, les mousquetai-