Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

province parut accepter facilement que la capitulation de Paris fût celle de toute la France.

Il faut affirmer, en principe, que la chute de Paris ne devait pas entraîner la fin de la guerre, et que les patriotes enflammés qui réclamaient la lutte jusqu’au bout étaient logiques ; mais il convient aussi de reconnaître que la France était à bout de vigueur, morale et physique, et que les défenses désespérées, à la russe et à l’espagnole, ne correspondaient ni à nos mœurs, ni à nos tempéraments, ni surtout à nos intérêts.

On ne peut qu’applaudir au langage véhément de Gambetta, télégraphiant de Bordeaux aux préfets, le 31 janvier, à 11 heures et demie du soir :

… Paris inexpugnable, vaincu par la famine, n’a pu tenir en respect plus longtemps les hordes allemandes… toutefois Paris, en succombant, nous laisse le prix de ses sacrifices héroïques. Pendant cinq mois de privations et de souffrances, il a donné à la France le temps de se reconnaître, de faire appel à ses enfants, de trouver des armées et des armes, de former des armées jeunes encore, mais vaillantes et résolues, auxquelles il n’a manqué jusqu’à présent que la solidité, qu’on n’acquiert qu’à la longue.

Grâce à Paris, si nous sommes des patriotes, nous tenons en main tout ce qu’il faut pour nous venger et nous affranchir, mais comme si la mauvaise fortune tenait à nous accabler, quelque chose de plus douloureux que la chute de Paris nous attendait. On a signé, à notre insu, sans nous avertir, sans nous consulter, un armistice, dont nous n’avons connu que tardivement la coupable légèreté, qui livre aux troupes prussiennes des départements occupés par nos soldats, et qui nous impose l’obligation de rester trois semaines au repos, pour réunir, dans les tristes circonstances où se trouve le pays, une Assemblée Nationale…

Gambetta protestait d’avance contre l’élection « d’une chambre réactionnaire et lâche que rêve l’étranger ». Il appelait, de ses vœux, une assemblée voulant la paix, si la