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gêné dans son expansion morale et intellectuelle, qu’on voit recourir à l’insurrection, affirme son droit à l’existence. Alors même qu’aux contemporains, aux acteurs, au public qui a vu, qui a failli jouer un rôle dans le drame, qui en a supporté les gênes, les désastres, qui a ressenti avant et pendant l’action de l’inquiétude et de l’effroi, le mouvement semble régressif, il constitue toujours un pas en avant, un effort vers un devenir meilleur, une étape de plus vers le but désiré, entrevu, but d’ailleurs destiné à reculer, indéfiniment, devant l’humanité en marche. Le progrès est mobile, jamais il ne saurait être atteint. Acquis, fixé, il perdrait son nom.

Entre tous les mouvements populaires, dont l’Histoire nous a conservé la trace, l’Insurrection parisienne du 18 mars 1871, et la période révolutionnaire désignée sous le nom de « la Commune » offrent la preuve que les insurrections, même écrasées sous la lourdeur des crosses, étouffées dans le silence des historiens, ensevelies sous l’amas des mensonges, des calomnies et des injures, sont vivaces, fécondes, et prennent, dans la suite des années, une lente et persistante revanche.

Cette démonstration sera la conclusion de cet ouvrage.

La France, redevenue forte, prospère, indépendante vis-à-vis des nations rivales, émancipée à l’intérieur, affranchie de la séculaire servitude de l’Église, ouvrant au prolétariat les routes jusqu’ici barrées, ou à peu près, du pouvoir politique, organisant le monde du travail, donnant à tous, comme l’air et la lumière, l’instruction et la liberté, la France Républicaine du xxe siècle n’existerait pas sans les événements de 1871.