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Le bombardement, malgré les préparatifs de l’armistice, se poursuivait très vif. Le même numéro de l’Officiel qui annonçait les négociations enregistrait le rapport du général de Valdan, remplaçant Schmitz, dans lequel il était dit que : « sur les fronts de l’est un combat violent d’artillerie avait eu lieu toute la matinée, et que les défenses du Nord, depuis le Drancy jusqu’au fort de la Briche, étaient l’objet d’un bombardement très actif. On ne signalait qu’un tué et 18 blessés.. » C’était encore trop, et ces ultimes sacrifices étaient aussi inutiles que cruels.

JULES FAVRE À VERSAILLES

Le canon tonnait au nord et au sud jusqu’à minuit, dans la nuit du 25 au 26, quand, à minuit et quart, le silence fut général et brusque, des deux côtés. Plusieurs fiacres franchirent la porte d’Auteuil. Ils emmenaient M. Jules Favre et son secrétaire, le général de Valdan, chef d’état-major général, et un officier de service, le général Vinoy et son aide de camp, M. Washburne, ministre des États-Unis, et un attaché, le général de Beaufort d’Hautpoul, le capitaine d’état-major comte d’Hérisson, officiers d’ordonnance, plus deux secrétaires, et un domestique portant la valise de Jules Favre. La Seine fut traversée en barque, au pont de Sèvres, au passage ordinaire des parlementaires. Des officiers allemands avec une voiture à quatre chevaux attendaient. Jules Favre y prit place. Il fut conduit immédiatement à Versailles, et introduit dans un salon. Il entra seul, en redingote noire, l’air triste mais digne. Sa lèvre ironique et dédaigneuse s’accentuait dans un pli d’souffrance. Trois personnes l’attendaient. C’étaient le roi de Prusse, qui venait d’être salué empereur d’Allemagne, de Moltke et Bismarck. Guillaume se leva et vint au-devant du repré-