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nécessaire, et aussi, ce qui était pareillement insupportable pour beaucoup, l’absence ou la raréfaction des choses superflues. Les femmes avaient assurément plus souffert que la portion masculine, d’abord avec les queues matinales à la porte des boucheries, laiteries, boulangeries, et aussi à raison du changement d’habitudes, de la toilette et du costume négligés, de la rupture des relations, de la cessation des visites, des dîners, des distractions traditionnelles et des fêtes familiales. Les Parisiens, et ce n’était pas assurément leur faute, n’avaient cependant couru que peu de dangers du fait des hostilités ; le bombardement, sauf quelques regrettables accidents, avait fait plus de tapage que de victimes. On ne saurait, tout en rendant justice à l’attitude vaillante des assiégés, assimiler leur héroïsme à celui des compagnons de Léonidas. Mais, en admettant qu’ils eussent été tous décidés, et l’hypothèse est admissible, à se faire tuer dans le ravin de Buzenval, devenu les Thermopyles parisiennes, comme on ne leur avait pas demandé ce sacrifice complet, en réalité les projectiles prussiens n’avaient fait dans les rangs de la population armée que des vides beaucoup moins importants que ceux dus à la disette et à la maladie parmi la population civile. Elle ne se battait pas, mais elle devait manger tous les jours.

Après le 22 janvier, un chef de division de la ville de Paris, nommé Pelletier, insista pour être entendu par le gouvernement. Introduit, il déclara « que la commission chargée de l’alimentation avait commis une erreur sur la quantité des farines à sa disposition, qu’elle n’avait pu réunir, pour le surlendemain, que trois mille quintaux, qu’il lui en fallait au moins cinq mille six cents ». Jules Favre qui raconte ce fait, ajoute :

Il n’y a pas de mois dans la langue humaine qui puisse