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LIVRE IV

LA CAPITULATION

LA DERNIÈRE BOUCHÉE DE PAIN

L’émeute du 22 janvier aurait réussi, que, sans parler des difficultés militaires qui n’eussent été ni pires ni diminuées par la présence d’hommes nouveaux au gouvernement, la Commune se fût trouvée en face du redoutable problème de l’alimentation quotidienne. La solution ne pouvait être que l’armistice, avec ravitaillement, préliminaire de la capitulation. Paris était réellement à bout de forces et de patience. Tout en reconnaissant qu’il j avait des subsistances dissimulées, et qu’on pouvait encore vivoter quelques heures, par un rationnement impitoyable, avec des perquisitions adroites et la distribution progressive des vivres de réserve, le siège ne pouvait être prolongé sans risquer de voir décimer inutilement, par la faim et les maladies provenant de l’inanition, la moitié des habitants. La classe moyenne et les gens qui n’étaient ni fonctionnaires ni inscrits aux bureaux de bienfaisance étaient surtout éprouvés. La patience et la résistance physique et morale de la population avaient été admirables. Il avait fallu beaucoup de courage négatif et une dose forte de bravoure passive pour supporter, durant cinq mois, la privation du