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l’autruche qui se cache la tête sous le sable en attendant la mort, imitions le lion acculé qui s’élance sur son ennemi et lui fait sentir sa griffe dans une dernière convulsion d’agonie ; sortons tous, hommes, et femmes, enfants, peuple, bourgeois, oublions nos divisions, nos griefs, nos haines, pardonnons à la bourgeoisie, si elle veut mourir avec nous ; sortons à quinze cent mille, à deux millions ; les Prussiens ne pourront nous massacrer tous ; ceux qui survivront iront nous chercher des vengeurs, et si nous mourons, nous aurons fait une fin digne de la capitale du monde !

Les clubs servirent à soulager la conscience populaire, à soutirer aussi, dans bien des cas, l’électricité révolutionnaire. On peut attribuer à leur force dérivative, à leur efficacité, analogue à celle d’un paratonnerre, pour attirer et canaliser la violence populaire, le calme relatif de Paris, et l’innocuité, absolue au 31 octobre, partielle au 22 janvier, des émeutes pendant le siège. Il n’est pas besoin, pour considérer comme salutaire leur maintien, d’invoquer l’argument, un peu policier, de leur historiographe, qui prétend « qu’ils servaient d’indicateurs au gouvernement » et prévinrent ainsi, les autorités averties ayant pu prendre leurs précautions, plus d’une explosion dangereuse. On ne peut nier que les clubs remplirent, en plusieurs circonstances, l’office de soupape de sûreté, ou d’avertisseur, comme les plombs des chaudières surchauffées, mais ce n’est là qu’une particularité contestable et secondaire. M. de Molinari voit plus juste et constate une forte vérité, quand il dit que les clubs ont contribué à exciter cette fièvre de patriotisme qui exaltait les âmes, et qui aurait sauvé la France, en doublant ses forces morales, se des forces morales avaient suffi pour le sauver, et aussi lorsqu’il fait observer que, les théâtres étant fermés, les clubs fournissaient le spectacle, et l’alimentation intellectuelle si nécessaire à une population enfermée.