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défense à l’intérieur, les mitrailleuses commandant les escaliers, les mobiles bretons aux fenêtres, prêts à faire feu au commandement, qu’il se déclarait résolu à donner si on l’attaquait.

Deux autres délégations, l’une du XVe arrondissement (Grenelle), conduite par Léo Meillet, l’autre composée de différents groupes de la rive gauche, furent également reçues et éconduites par Chaudey. Les divers délégués, de retour sur la place de l’Hôtel-de-Ville, ayant fait connaître l’insuccès de leur démarche, furent conspués. L’un de ces délégués était Razoua, ex-commandant du 61e bataillon de Montmartre. Razoua avait été cassé de son grade à la suite du 31 octobre, mais son procès était pendant. À Buzenval, il avait suivi son bataillon, conservant ses galons, mais portant le fusil, pour faire le coup de feu, comme un simple garde. Au 22 janvier, il exerçait le commandement de fait. Ses hommes l’avaient, en partie, suivi ; des gardes isolés des autres bataillons de Montmartre s’étaient joints à lui.

Eugène Razoua était un ancien soldat d’Afrique, très brave, homme d’action, nullement politicien. Avec sa barbiche en fer à cheval, son visage sec et anguleux, son allure martiale et son franc-parler, il avait acquis une certaine popularité. Il avait publié des Souvenirs d’un chasseur d’Afrique, et Delescluze l’avait accepté au Réveil, où il rédigeait à la bonne franquette des « entrefilets » sur les choses militaires. Il ne craignait point ce qu’il appelait « un coup de chien » ; il était même venu au rendez-vous, donné à la Reine Blanche, dans l’intention de parlementer le moins possible, et, au premier mot de Delescluze, d’enfoncer à coups de crosses les portes de l’Hôtel-de-Ville. Il ne dissimulait pas son désir, mais il craignait d’entraîner les hommes qui l’avaient suivi dans une embuscade. Intro-