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bataillon des mobiles du Finistère, qui avait fait merveille au 31 octobre, était de nouveau chargé de défendre l’Hôtel-de-Ville. On avait au gouvernement, une grande confiance en ces bretons, et ils la justifièrent. Le comte de Legge les commandait. Ces mobiles, dépaysés et irrités, avaient l’âme vaillante et la conscience obtuse des anciens chouans. Ils ne parlaient guère que leur patois ; ils n’avaient que de très vagues rapports avec la population, dont ils ne comprenaient ni la langue, ni le républicanisme, ni l’entêtement à vouloir continuer la guerre. Ces têtus, qui avaient hâte de rentrer chez eux, devaient se montrer et énergiques, si on leur permettait de faire feu sur ces Parisiens, en qui els ne voyaient pas de compatriotes, mais de chenapans et des pillards, ainsi que leurs chefs les désignaient, des poltrons aussi, qui voulaient les envoyer à leur place contre les Prussiens, afin de toucher leurs trente sous, solde qui paraissait inouïe à ces paysans, très pauvres. Les bretons s’étaient barricadés dans l’Hôtel-de-Ville, ils avaient des mitrailleuses, et, sur l’ordre de leurs chefs, vers midi ils prirent leur poste de combat, derrière les fenêtres de la salle du trône (ou de conseil) au premier étage, et aussi à l’entresol.

Les chefs du mouvement s’étaient rendus d’assez bonne heure aux abords de l’Hôtel-de-Ville. Plusieurs membres de l’Alliance se réunirent chez Lefebvre-Roncier qui habitait rue de Rivoli, au numéro 60, en face du bâtiment municipal. Delescluze, Cournet, Edmond Levraud, Arthur Arnould s’y trouvaient. Blanqui se tenait, avec quelques fidèles, au café du Gaz, rue de Rivoli, au coin de la rue de la Coutellerie. Silencieux, il méditait. Par moments il donnait, à voix basse, de brèves consignes, et de ses mains gantées de noir, congédiait les importuns ou faisait des gestes évasifs, indiquant l’Hôtel-de-Ville. Il paraissait