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Daudet n’est pas plus avancé que moi ? Je l’ignore. Toujours est-il qu’il est assez étrange de voir deux romanciers notoires n’avoir même pas, dans les rangs de l’Université, l’épaulette de sous-lieutenant. Les parents du lycéen faisaient de lourds sacrifices pour qu’il pût obtenir, grâce au diplôme obligatoire et élémentaire, l’accès de certains emplois. Il avait tort de ne pas se violenter, afin de triompher des redoutables examens, qui semblent surtout faciles à ceux qui ne les ont pas subis. Sans doute, cet échec scolaire n’a pas nui à la fortune littéraire de l’Assommoir. Nul ne se préoccupe, aujourd’hui, de savoir si l’auteur a été fort en thème ou fruit sec, et tous les baccalauréats de l’Université ne sauraient rien ajouter à sa gloire. Mais il ne doit pas servir d’exemple, ni d’encouragement, aux écoliers présents et futurs, qui ne l’imiteraient qu’en cela. Ce n’est pas parce qu’il n’a pu passer son bachot que Zola s’est montré capable d’écrire Germinal. Les deux femmes, qui le gâtaient, lui avaient trop laissé la bride lâche sur le cou, durant ses années d’enfance, jours de grand air, d’escapades, de bondissement par les garrigues, par les ravins, et de longues rêvasseries à l’ombre, au bord de la rivière de l’Arc. Mais nous leur en devons reconnaissance. Cette éducation en liberté fut salutaire et inspiratrice. Elle priva la France d’un bachelier de plus ; elle lui valut peut-être l’un des plus robustes ouvriers de la plume. C’est tout gain pour le pays, pour la postérité mondiale aussi. Bénissons les deux mamans, d’avoir élevé leur Émile à la sauvageonne. L’enfant a pu vagabonder, comme un petit pâtre, tout en ayant la possibilité d’étudier comme un jeune bourgeois. Cette croissance indépendante,