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pas, et ne parlaient pas un mot de notre langue. La lecture des journaux anglais m’avait familiarisé avec quelques expressions dont je me servais pour me faire comprendre. Mais quels coups de tonnerre traversèrent ma vie ! Le suicide du colonel Henry, l’arrestation de Picquart, tous ces épisodes de la bataille d’idées que j’avais engagée surgissaient à mes yeux, et mon âme en était toute bouleversée. Ces jours-là, la reprise de ma tâche était plus difficile. Les mots ne venaient pas. Je me prenais la tête dans mes mains agitées par la fièvre, et m’épuisais en vains efforts pour retrouver le fil de ma pensée. Je sortais enfin de mon découragement, et un bienfaisant équilibre que j’obtenais pour le reste de ma journée était ma récompense. Le 27 mai 1899, j’écrivais le mot : « Fin » au bas du trentième et dernier chapitre. Et le 4 juin, une semaine après, mon manuscrit sous le bras, je rentrais en France. Pendant que mes ennemis s’acharnaient à ma perte, moi, je donnais à mon pays les meilleurs, les plus sages conseils. Je lui faisais toucher du doigt ses plaies pour qu’il put les guérir. Et, avec la Fécondité qui assure l’existence et la grandeur de mon pays, j’exaltais la Beauté. Le bouton de fleur est joli ; la fleur épanouie est belle. La vierge est moins belle que la mère. La femme exhale son parfum, montre toute son âme, acquiert toute sa beauté dans l’accomplissement de ses fins naturelles. C’était une vérité utile à propager comme celle dont Jean-Jacques Rousseau se fit l’ardent apôtre. Ces explications de Zola lui-même, et qui pourraient servir de préface à son livre, sont intéressantes, véridiques et justes. Elles ne demandent que quelques lignes de critique complémentaire. Fécondité est un livre d’une lecture assez pénible. D’abord, le sujet est plutôt dépourvu de charme, et les deux personnages principaux, Mathieu, l’étalon toujours en rut, et sa femme Marianne, toujours le ventre gros ou