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socialiste, sans cette appétence vers un idéal nouveau d’humanité heureuse et de conditions d’existence plus justes, avec la paix sociale établie définitivement sur les ruines de l’ancienne organisation sacerdotale, guerrière, capitaliste, abattue, l’intervention d’Émile Zola dans l’affaire Dreyfus, qu’on doit regretter, mais qu’il faut reconnaître sincère et désintéressée, serait inexplicable, un coup de tête, presque de folie. Or, étant données la situation mentale de l’auteur de Paris et les préoccupations neuves qui tenaillaient son esprit, il était logique et fatal, puisqu’il s’était produit une « affaire Dreyfus », puisque le pays était divisé en deux camps, que Zola fût dans un de ces camps. Avec son âme combative et son exaltation méridionale et nerveuse, il était également logique, et c’était comme une conséquence de la position des partis en présence, qu’il se mît du côté de ceux qui s’agitaient pour faire reconnaître l’innocence d’un condamné qu’ils proclamaient victime d’une erreur judiciaire, et qu’ils estimaient succombant sous les efforts combinés de ceux qui obéissaient à des préjugés religieux, ou qui voulaient maintenir intact le dogme d’infaillibilité d’un tribunal d’exception. Zola, bien que Paris fût écrit et publié avant que la reprise de l’Affaire n’éclatât, prévoyait, prophétisait la lutte qui allait s’engager. L’Affaire Dreyfus, c’était la bataille qu’il avait indiquée dans son livre, transportée dans la réalité. Avec Paris, Zola terminait la trilogie philosophique, où il avait gradué les efforts et les luttes de l’humanité, concentrés dans trois villes, pour s’élever de la superstition grossière à la religion habile et trompeuse, et enfin à la science, au travail, à la justice sociale. Sa conclusion, qui est la doctrine socialiste même, était l’homme