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expiant les fautes de tous, donnant son sang et jusqu’à son honneur, pour le salut de la Patrie ? Nier ma tendresse, nier ma pitié, nier mon culte en larmes, c’est nier l’éclatante lumière du soleil. Qui donc a écrit que la Débâcle était l’épopée des humbles, des petits ? Oui, c’est bien cela. Je n’ai pas épargné les chefs, ceux contre lesquels, autour de Sedan, monte encore le cri d’exécration des villages. Mais les petits, les humbles, ceux qui ont marché pieds nus, qui se sont fait tuer le ventre vide, ah ! ceux-là, je crois avoir dit assez leurs souffrances, leur héroïsme obscur, le monument d’éternel hommage que la nation leur doit dans la défaite. Qui donc pourrait prétendre que de tels sentiments sont ceux d’un calomniateur systématique de l’armée ? Des défenseurs du livre attaqué et faussement commenté se levèrent, et Zola fut compris et approuvé par des hommes dont le patriotisme, et même le militarisme, étaient avérés. Le Figaro publia, à la suite des discussions allumées par l’incendiaire de Bazeilles, une lettre intéressante du colonel en retraite Henri de Ponchalon. Cet officier supérieur disait : Voulez-vous permettre à un combattant de l’armée de Châlons de vous adresser quelques réflexions au sujet de votre réponse au capitaine bavarois Tanera ! Je ne suis pas étonné que ce capitaine ait critiqué votre livre ; il est dans son rôle. Les Allemands ont toujours affecté de grossir les difficultés qu’ils ont rencontrées : c’est ainsi qu’ils ont soutenu que le maréchal Bazaine avait rempli tout son devoir ! Oui, « la vérité doit se dire » ; cette vérité n’est-elle pas le meilleur garant de l’avenir ? Ce n’est pas avec des illusions que nous ferons revivre les gloires militaires du passé. Oui, nous avons eu des généraux ignorants, incapables ; j’en ai connu qui ne savaient pas lire une carte ! Mais, tout en reconnaissant le sentiment patriotique dont vous êtes inspiré, je dois dire que vous avez généralisé ce qui n’était qu’une exception.