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du moins toujours héroïques, toujours debout sur la brèche, toujours grands dans la défaite ? Lui était-il permis de refaire l’histoire, et, pour flatter l’orgueil national, devait-il rééditer des légendes, plutôt périlleuses ? Disons d’abord que l’on ne peut maintenant connaître les causes exactes de l’immense désastre, ni apprécier, pour ainsi dire scientifiquement et physiologiquement, l’effondrement de Sedan. Nous sommes beaucoup trop près du sinistre. Ce n’est pas quand le sol frémit encore qu’on peut, avec sérénité, étudier les origines d’une commotion sismique. Les survivants de la catastrophe, au nombre desquels était Zola, ont gardé l’ébranlement dans les nerfs de la secousse, et cela fait trembler les mains tenant la plume, comme l’instrument vacillerait entre les doigts du savant penché sur le cratère fumant, grondant, après l’éruption. Il faut laisser à la brûlante terre le temps de se refroidir, pour en reconstituer les éléments, avant et pendant la conflagration. Malgré la conscience avec laquelle Zola s’est documenté, et la patience dont il a usé pour se renseigner, auprès des hommes compétents, auprès des acteurs et des témoins contemporains, on ne saurait lui demander d’avoir d’une façon infaillible précisé, dans la Débâcle, les explications de l’inattendue et déraisonnable déroute. L’imprévoyance des chefs militaires, le désordre de l’administration, la rivalité des généraux, la disproportion des forces en présence, l’armement inférieur, la préparation militaire insuffisante, la maladie de l’empereur, commandant en chef, et sa faiblesse comme général d’armées, voilà sans doute des causes incontestées de la défaite. Il en est d’autres. Parmi les facteurs importants de notre désarroi, il faut indiquer les mouvements de