Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/347

Cette page n’a pas encore été corrigée

fête, passe encore, mais en semaine il n’a ni le désir, ni le temps d’aimer. Vénus aime des corps reposés. Zola a mal vu le paysan électeur, politicien, agent électoral, ou candidat. Ses scènes de candidature sont faibles. Il n’a pas su tirer tout le parti désirable de l’âpre lutte des paysans pour les fonctions municipales. L’écharpe est la rivale du lopin de terre dans les convoitises rustiques. Balzac, dans ses Paysans, a également négligé, mais avec raison, la passion politique rurale. De son temps, les paysans n’étaient point électeurs, mais l’abolition du cens, et le suffrage universel ont excité les ambitions et les rivalités paysannes. Enfin, une dernière critique, les époux Charles, tenanciers honoraires d’une maison hospitalière, admis, considérés, sont trop poussés à la charge. Malgré ces défauts et ces exagérations qui, par instant, semblent des gageures, la Terre est une œuvre puissante, et qui peut soulever des critiques, des indignations même, plus ou moins sincères, mais dont la maîtrise est incontestable comme le talent de l’auteur. Je reçus, le jour même de la publication de cet article, la lettre suivante de l’auteur de la Terre, qui ne figure point dans le 2e volume de la Correspondance d’Émile Zola, tout récemment paru. Paris, 27 novembre 87. Mon cher Lepelletier, Merci mille fois de votre article, qui me fait grand plaisir ; car il comprend et il explique au moins. Mais que de choses j’aurais à vous dire, à vous qui êtes un ami ! Il y a de la vigne à la lisière de la Beauce, les vignobles de Montigny, près desquels j’ai placé Rogues, sont superbes. Tous les noms que j’ai employés, sauf celui de Rogues, sont beaucerons. Il n’est pas vrai que la fatigue soit contraire à Vénus : demandez aux physiologistes. Si vous croyez que les paysans ne reproduisent que le dimanche et le lundi, je vous dirai d’y aller voir. La lutte politique dans les villages n’est point aussi âpre, ouvertement, que vous le pensez : tout s’y passe en manœuvres sourdes. Mes Charles sont copiés sur nature ; et puis, c’est vrai, eux et Jésus-Christ sont la fantaisie