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J’ai z’evu des coups.
J’en ai-t’y r’çu un terrible
Dans mon pauv’pétard…
On n’m'appell’pus l’invincible,
Ah ! j’suis-t-y pochard !

Cette question de forme, de vocabulaire, n’a donc pas eu l’importance ni l’originalité que lui attribuait l’auteur. Le grand succès de l’Assommoir tint à d’autres causes : d’abord à l’intensité du drame de l’alcool, à la peinture violente des mœurs populaires, à la vigueur et au coloris des tableaux de l’existence ouvrière. Il faut également noter que l’Assommoir a été surtout un succès bourgeois, presque un triomphe de réaction. L’antagonisme des classes était flatté. Malgré les affections sympathiques, les élans, les effusions, qui se manifestent, surtout dans la vie publique, en vue de la captation électorale, ou par crainte prudente, ceux qu’on nomme les bourgeois n’aiment guère ceux de leurs contemporains qu’on englobe dans la désignation de « peuple » . La distinction paraît subtile. Elle est forte, cependant, et aisée à constater. Elle se traduit par le langage, par le costume, par le cantonnement et la séparation d’existences et d’habitudes. Ceux qui ne se livrent pas à un travail manuel, qui ne sont pas salariés à la journée, ou qui ont des prétentions à une certaine élégance, à une distinction plus ou moins affinée, ceux qui se classent dans la catégorie des « messieurs », leurs épouses étant des « dames », et leurs filles des « demoiselles », —on sait quel fossé il y a entre ces deux expressions : une « dame » ou une « femme » vous demande ! » —ceux-là sont désignés sous le nom historique et politique de « Bourgeois » ; ils forment une formidable caste, allant de la haute finance, de l’aristocratie vieille ou neuve, des