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C’est un drame intime ; l’histoire d’un fou, la progression effrayante de la fêlure cérébrale, avec des scènes de vie provinciale et cléricale. C’est la captation d’une fortune, la démolition lente d’une maison, le détraquement d’une intelligence, accompagnant la dispersion du bonheur domestique, sous les yeux et par l’effort d’un prêtre ambitieux et tenace, qui semble sorti du séminaire de l’abbé Tigrane. La Faute de l’abbé Mouret est un livre étrange et touffu, où la botanique se mêle à la liturgie. On voit un prêtre, Serge Mouret, s’éprendre d’une petite sauvagesse, Albine, sous les arbres d’un paradis moderne et fantastique, le Paradou. Il y a tout un poème adamique dans ce livre prestigieux, qui semble par moments inspiré par un jardinier, en d’autres, par Milton. C’est une propriété de la campagne d’Aix, visitée dans sa jeunesse, que Zola a décrite sous le nom patoisé de Paradou. Toutes les parties techniques de ce livre sont très soignées, très vérifiées. Zola, pour les nomenclatures horticoles, s’était procuré le catalogue de Lencézeure et, pour les descriptions rituéliques, car la messe tient une place aussi considérable dans l’ouvrage que l’énumération florale, il ne manquait pas de suivre, le paroissien d’une main, le crayon de l’autre, les offices à Sainte-Marie-des-Batignolles. Le digne abbé Porte, curé de la paroisse, avait en lui un fidèle, jusque-là ignoré, qui donnait un exemple fort édifiant. On parlait même de lui offrir une place au banc d’œuvre, songez donc ! un homme de lettres connu, et passant pour incrédule, qui revenait au Seigneur ! Un jour, l’assidu et pieux chrétien ne reparut plus à l’église : la Faute de l’abbé Mouret était terminée,