Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/180

Cette page n’a pas encore été corrigée

place pour l’homme de lettres, dans la société bouleversée. Comme j’avais avec moi ma femme et ma mère, sans aucune certitude d’argent, disait-il plus tard, en se remémorant ces journées d’angoisse et de misère, j’en étais arrivé à croire tout naturel et très sage de me jeter, les yeux fermés, dans cette politique que je méprisais si fort, quelques mois auparavant, et dont le mépris m’est, d’ailleurs, revenu tout de suite. Zola, qui devait plus tard, indirectement, revenir à la politique, indirectement peut-être d’une façon un peu inconsciente, fut donc sur le point de devenir fonctionnaire. En mars 1871, seulement, c’est-à-dire après la paix, et quand la lutte communaliste débutait, Clément Laurier, tenant la promesse faite à Glais-Bizoin, nommait Zola sous-préfet de Castel-Sarrazin, dans le Tarn-et-Garonne. Cette nomination fut presque aussitôt rapportée, et Zola n’endossa point l’uniforme à broderie d’argent. Il n’eut pas à se déranger pour aller même voir sa sous-préfecture. Cette petite ville et cette petite fonction ne lui convenaient guère. Il s’attendait à mieux. Et puis, il venait d’obtenir une correspondance au Sémaphore de Marseille, et le journal la Cloche, de Paris, lui prenait des « Lettres parlementaires » . Il avait ainsi le pain assuré, et même des émoluments supérieurs au traitement d’un sous-préfet de 3e classe. De plus, il conservait l’indépendance qui convenait à son caractère. L’espoir lui revenait de pouvoir reprendre, la guerre étant terminée, sa carrière purement littéraire. Il avait sa Curée à achever. Il lui parut qu’il lui serait bien difficile de terminer son roman, et surtout de le faire paraître, s’il s’enterrait dans la petite ville gasconne qui lui était assignée. Qui songerait à