devraient être des livres scientifiques, pas du tout des fictions impressionnantes ou amusantes, destinées à distraire les oisifs et à remplir les récréations des gens occupés. Il se défendait contre le reproche, nouveau alors, depuis devenu banal à son égard, de « pornographie » . Il suppliait qu’on le voulût bien voir tel qu’il était et qu’on le discutât pour ce qu’il était. Tant que j’ai écrit Thérèse Raquin, dit-il, j’ai oublié le monde, je me suis perdu dans la copie exacte et minutieuse de la vie, me donnant tout entier à l’analyse du mécanisme humain, et je vous assure que les amours cruelles de Thérèse et de Laurent n’avaient pour moi rien d’immoral, rien qui puisse pousser aux passions mauvaises. Il est certain que, si l’on admet que la lecture ait une influence sur les actes des hommes, qu’elle leur suggère l’imitation des faits consignés dans un livre, et les pousse à reproduire les gestes et à s’assimiler les passions des personnages, les lecteurs de Thérèse Raquin ne sauraient être sérieusement incités à prendre les deux amants pour modèles. Ces détraqués noient le mari, pour être libres, et leur accouplement devient le pire supplice. Le remords du crime impuni est peint avec des couleurs si vives, et le châtiment du tête à tête des tristes complices est si terrible qu’on ne saurait y voir un encouragement au meurtre conjugal. Thérèse Raquin serait plutôt, tel l’Assommoir que les pratiques Anglais considèrent comme un excellent sermon laïque contre l’ivrognerie, un plaidoyer persuasif pour le respect de l’existence des maris. Le tableau des hantises macabres du couple assassin pourrait-il tenter les amants disposés à les imiter, et les joies de l’adultère criminel apparaissent-elles désirables, au spectacle du ménage
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