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pour le devenir. Il n’entendait cependant pas ouvrir son cénacle à tout venant. Il avait, au contraire, l’idée d’un cercle très fermé. Dès 1860, il formulait ce projet : Il m’est poussé, ces jours derniers, écrivait-il à Baille, une certaine idée dans la tête. C’est de former une société artistique, un club, lorsque tu seras à Paris ainsi que Cézanne. Nous serons quatre fondateurs… nous serons excessivement difficiles pour recevoir de nouveaux membres ; ce ne serait qu’après une longue connaissance du caractère et des opinions que nous les accepterions dans notre sein. Nos réunions, hebdomadaires par exemple, seraient employées à se communiquer les uns aux autres les pensées qu’on aurait eues, les remarques que l’on aurait faites durant la semaine ; les arts seraient, bien entendu, le grand sujet de conversation, bien que la science n’en soit nullement exclue. Le but surtout de cette association serait de former un puissant faisceau pour l’avenir, de nous soutenir mutuellement, quelle que soit la position qui nous attende. Nous sommes jeunes, l’espace est à nous, ne serait-il pas sage, avant de nous serrer la main, de former un nouveau lien entre nous, pour qu’une fois dans la lutte nous sentions à nos côtés un ami, ce rayon d’espoir dans la vie humaine. Outre cet avantage futur, nous aurons celui de passer une agréable journée, chaque semaine, de vivre et de fumer quelques bonnes pipes… Ce projet s’était trouvé facilité, par suite du loisir dû à la cessation de la collaboration aux journaux de Villemessant, et réalisé par la présence à Paris des vieux amis de Provence, membres d’avance désignés, membres exclusifs aussi, du futur cénacle de Zola. Ces idées de groupement et de concentration d’efforts et de pensées avaient été formulées, dans le roman, par Balzac, avec les Treize et les amis de d’Arthez, au théâtre, par Scribe, dans la Camaraderie, à la brasserie, par Henry Murger et ses Buveurs d’eau. Mais ces modèles de Cénacle avaient un caractère plus positif, plus pratique,