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de rhétorique, le pain qui nourrit, la tranquillité qui engraisse. Le point de départ de Zola fut particulièrement heureux, encourageant. Il est probable que, s’il eût échoué alors, il n’eût pas songé un instant à retourner à son rond de cuir de la librairie, mais il eût végété dans les bas travaux des revues et des périodiques. Il eût peut-être écrit des historiettes douceâtres dans des journaux de modes. Il n’eût fait que développer la série affadissante des Contes à Ninon. En débutant triomphalement au Figaro, il acquit, non pas la conscience de sa force, il la possédait de longue date, mais la démonstration pour autrui de son mérite. Il était établi qu’on devrait désormais compter avec lui. Par la suite, malgré un ralentissement dans sa montée, et un recul dans sa marche à la gloire, cette confiance en soi, ainsi justifiée, lui permit d’entreprendre la construction de son massif édifice et de le mener jusqu’au bout, jusqu’au faîte, sans défaillir, sans douter une minute du couronnement final. Les articles de critique d’art de Zola, publiés sous ce titre exubérant de personnalité et d’orgueil : « Mon Salon », firent presque scandale. Le jeune critique, irrespectueux envers les réputations consacrées, célébrait des talents ignorés, et proclamait des noms inconnus. Ce fut là le premier manifeste de ce qui devait s’appeler, assez improprement d’ailleurs, « le Naturalisme » . Les toiles de Manet n’avaient rien de « naturaliste », au sens fâcheux que, par la suite, on attribua à ce terme, c’est-à-dire à l’expression brutale, et souvent grossière systématiquement, de faits, d’actes, de tableaux et de sensations d’une intense matérialité. Zola fut attaqué et vilipendé par la foule ameutée des peintres pompiers et des critiques prudhommesques. De part et d’autre,