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aimables sur ce thème douloureux. Il ne se plaint plus de la solitude, puisque Ninon lui est présente, en rêve. Les Contes à Ninon comportent : Simplice, une histoire de fées, aux senteurs forestières, évoquant, avec son ondine qu’un baiser fait mourir, la ballade du Roi des Aulnes, et les légendes allemandes où fleurit le vergiss-mein-nicht. Puis, c’est le Carnet de Danse, rêverie de jeune fille troublée à l’évocation des danseurs, d’un surtout, dont les mains ont tremblé autour de sa taille, pendant le bal, l’élu de l’imagination et du souvenir parmi tous ceux qui se sont disputé les roses de son bouquet. C’est tout à fait inoffensif. Celle qui m’aime, vision foraine, tableau populaire, avec une tendance satirico-philosophique, est d’une facture plus virile. Il y a comme un souffle précurseur de ces foules de l’Assommoir et de Germinal, que fera mouvoir si puissamment, un jour, l’auteur débutant. Il a lu probablement Germinie Lacerteux, quand il a imaginé ce conte. La scène de racolage est écourtée, insuffisante, mais déjà indique une tendance à l’observation. Il y a une ironique tristesse dans l’exclamation des hommes de conditions diverses rencontrant la fille banale et son amoureux de hasard, les saluant de l’apostrophe uniforme : « Eh ! Eh ! c’est celle qui m’aime ! » La malédiction mesurée du toqué compteur d’étoiles a de la verve : Savez-vous combien coûte une étoile ? Sûrement, le bon Dieu a fait là-haut une grosse dépense, et le peuple manque de pain, monsieur !… À quoi bon ces lampions ? Est-ce que cela se mange ? Quelle en est l’application pratique, je vous prie ? Nous avions bien besoin de cette fête éternelle ! Allez Dieu n’a jamais eu la moindre teinte d’économie sociale !…