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poétique des Nuits. L’Aérienne est à la fois parente de la dame disant au poète de prendre son luth avant de l’embrasser, et de la Sylphide de Chateaubriand. Elle dialogue avec lui, sur le mode mussettiste. A noter ce salut à la Provence rappelant fort l’hommage à l’Italie, l’une des cavatines favorites de Musset :

… Ô Provence, des pleurs s’échappent de mes yeux,
Quand vibre sur mon luth ton nom mélodieux.
Terre qu’un ciel d’azur et l’olivier d’Attique
Font sœur de l’Italie et de la Grèce antique,
Plage que vient bercer le murmure des flots,
Campagnes où le pin pleure sur les coteaux ;
Ô région d’amour, de parfum, de lumière,
Il me serait bien doux de l’appeler ma mère…
… Mais, si je suis enfant d’un ciel triste et brumeux,
Nymphe, bien jeune encore, je vis briller tes yeux,
Et, courant me chauffer au duvet de tes ailes,
Avide, je suçais le lait de tes mamelles.
Et toi, mère indulgente et le sourire au front,
Tu ne repoussas pas ce frêle nourrisson.
Au bruit de tes baisers, tes bras, dans la charmille,
Me bercèrent parmi ta céleste faucille,
Et ton regard d’amour fit glisser dans mon cœur
Un reflet affaibli de ta sainte splendeur.
Ah ! c’est de ce regard, que moi, l’enfant de l’ombre,
Je vis un astre d’or remplacer ma nuit sombre.
Et sentis de ma lèvre un souffle harmonieux
S’échapper en cadence, et monter dans les cieux.
C’est de lui que je tiens ma couronne et ma lyre,
Mon amour des grands bois, des femmes et du rire…

Malgré la faiblesse de nombre d’expressions, les épithètes vagues et banales, les chevilles abondantes, que pourtant il dénonçait avec virulence, Zola, dans cette invocation virgilienne, a montré un certain souffle. Il a, en outre, affirmé son sentiment vrai, presque filial, pour cette terre des figues et des cigales, où il avait joué