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ŒUVRES MORALES. De la Fin du monde. Depuis combien de temps a duré ce monde ac- tuel, dont font partie les hommes, c’est-à-dire une des espèces qui le composent ? Il n’est pas facile de le dire, pas plus que de connaître combien de temps il doit durer encore. L’ordre qui le régit paraît immuable et passe pour tel, parce qu’il ne change que peu à peu et après un temps incom- préhensible, de sorte que ses mutations sont à peine saisies, je ne dis pas par les sens de l’homme, mais par son entendement. Ce temps, si long qu’il soit, n’est qu’un instant par rapport à la durée éternelle de la matière. On voit, dans ce monde actuel, une mort continuelle des individus et une transformation continuelle des choses : mais, comme la destruction est continuellement compensée par la production et que les genres se consers’ent, on estime que ce monde n’a et n’aura en soi aucune cause par laquelle il puisse ou doive périr et qu’il n’offre aucun signe de caducité. Néanmoins on peut s’apercevoir du contraire, et à plus d’un in- dice, mais, entre autres, à celui-ci. Nous savons que la terre, à cause de son per- pétuel mouvement de rotation autour de son axe, qui fait fuir du centre les parties qui environnent l’équateur, et qui attire vers le centre celles qui en’ironnent le pôle, nous savons, dis-je, que la