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de cette sorte de prison où il se trouve par la volonté des Dieux, autrement dit de se priver spontanément de la vie.


Porphyre.

Je t’en prie, mon cher Plotin ; laissons de côté, pour le moment, Platon, ses doctrines et ses fantaisies. Autre chose est louer, commenter, défendre certaines opinions dans les écoles et dans les livres, autre chose est les suivre dans la pratique. Qu’on me passe d’avoir approuvé et suivi les sentiments de Platon dans l’école et dans les livres, puisque tel est l’usage aujourd’hui : mais, dans la vie, loin de les approuver, je les ai plutôt en abomination. On dit, je le sais, que Platon mêlait à ses écrits ces doctrines sur la vie future, afin que les hommes entrassent en doute et en soupçon sur leur état après la mort, et que par cette incertitude et par la crainte de peines et de calamités futures, ils fussent détournés dans leur vie des injustices et des autres mauvaises actions. Si je croyais que Platon ait été l’auteur de ces doutes et de ces croyances et qu’ils les ait inventées, je dirais : Tu vois, Platon, quelle ennemie éternelle notre espèce a toujours trouvée dans la nature, ou dans la nécessité, ou dans la destinée, ou dans la puissance, quelle qu’elle soit, créatrice et maîtresse de l’univers. À notre espèce on