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POÉSIES DE

LÉOPARDI.

le char pesant de Jupiter faire gronder son tonnerre sur nos têtes, entr’ouvrant le ciel ténébreux. Alors au milieu des précipices, à travers les profondes vallées, il nous plaît d’affronter les orageuses ondées, de voir fuir au loin les troupeaux épouvantés, d’écouter le retentissement du grand fleuve luttant contre ses rives, et la fureur menaçante des eaux.

Ton dais est magnifique, ciel divin ; tu es belle, ô terre emperlée de rosée ! Cette infinie beauté, hélas ! les Dieux ont interdit à la malheureuse Sapho d’en jouir. Ô nature ! c’est en vain que je tourne vers toi mon cœur et mes regards suppliants. Amante méprisée, hôte indigne et triste de tes splendides domaines, tu n’as plus de beautés pour moi. La rive ensoleillée, pour moi, n’a plus de sourires, ni la blancheur matinale des portes du jour, ni le chant des oiseaux au plumage de couleur, ni le murmure des hêtres ; rien ne me sourit ; le ruisseau qui roule son onde cristalline à l’ombre des saules penchants, dédaigne d’effleurer mes pieds tremblants, il fuit à mon ap