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meilleure lame de Kan-ue. Car ce principe de vie s’étend à tout, depuis le ciel en haut jusqu’à la terre en bas, aux transformations de tous les êtres, étant si peu sensible qu’on ne saurait le figurer, confondant son action avec celle du Souverain (ici le Souverain cosmique, l’âme du monde). Intégrité et pureté, voilà ce qui conserve l’âme et l’empêche de s’user. Dans son état d’intégrité et de pureté, elle communie à la règle céleste (synonyme du Souverain, ci-dessus). De là les aphorismes suivants : Le vulgaire estime la fortune, le lettré la réputation, le savant les places, le Sage l’intégrité de son esprit vital. Le principe de vie, c’est la pureté et l’intégrité qui le conservent. Pureté veut dire absence de tout mélange, intégrité signifie absence de tout déficit. Celui dont l’esprit vital est parfaitement intègre et pur, celui là est un Homme vrai.


Chap. 16. Nature et convention.

A.   Prétendre amender la nature en la ramenant à son état original, par le moyen des études qui se font dans les écoles actuelles ; vouloir régler les penchants en les éclairant par les raisonnements classiques, c’est faire montre d’un bien grand aveuglement. Les anciens Sages ne connaissaient de science que celle qui émanait spontanément du calme de leur nature, la simple appréhension des choses, qui ne les troublait pas. Leur raison naturelle dérivée du Principe fonctionnait normalement dans leur paix intérieure. Ainsi, naquirent ces notions toutes simples : bonté, tout supporter ; équité, être raisonnable. À l’équité répondit la loyauté ; la franche vérité produisit la joie et son expression la musique ; la confiance mutuelle produisit la politesse et son expression les rites. Plus tard, ayant été faussés, les rites et la musique devinrent un élément de perversion, comme il arrive de tout ce qui n’est plus conforme à la nature. — Tout au commencement, les hommes étaient simples, comme la nature à ses débuts. Alors aucun trouble dans les mouvements naturels, aucun désordre venant des forces physiques. Le cours des saisons était régulier, aucun être ne souffrait, pas de morts prématurées, ni théories ni sciences. Ce fut l’âge de la parfaite unité et union, de l’homme avec la nature et des hommes entre eux. Personne n’intervenait dans l’ordre naturel. Tout suivait son cours spontanément. — Cependant la décadence vint. Elle commença par les institutions de Soei-jenn et de Fou-hi (production artificielle du feu, lois du mariage et de la famille), qui parurent un progrès, mais inaugurèrent la ruine de la simplicité et de la promiscuité premières. La décadence s’accentua au temps de Chenn-noung et de Hoang-ti (abandon de la vie nomade, agriculture, formation de l’État), le bien-être augmentant, mais aux dépens de la spontanéité ancienne. Elle s’accentua bien davantage, quand Yao et Chounn, régnant, introduisirent l’amendement