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C’est donc entre les extrêmes 500-330, qu’il faut placer l’élucubration des idées contenues dans ce volume. Je dis, des idées, non des écrits ; voici pourquoi : — De Lao-tzeu, la tradition affirme formellement qu’il écrivit. L’examen attentif de son œuvre, paraît donner raison à la tradition. C’est bien une tirade, tout d’une haleine, reprise ab ovo quand l’auteur a dévié ; une enfilade de points et de maximes, plutôt qu’une rédaction suivie ; le factum d’un homme qui précise et complète sa pensée, pas obscure mais très profonde, en reprenant, en retouchant, en insistant. Primitivement, aucune division en livres et en chapitres n’exista. La division fut faite plus tard, assez maladroitement. — Quant à Lie-tzeu et Tchoang-tzeu, l’examen des deux traités qui portent leurs noms, montre à l’évidence que ces deux hommes n’ont pas écrit. Ils se composent d’un assemblage de notes, de fiches, recueillies par les auditeurs souvent avec des variantes et des erreurs, collationnées ensuite, brouillées et reclassées par des copistes, interpolées par des mains tendancieuses non taoïstes, si bien que, dans le texte actuel, il se trouve quelques morceaux diamétralement contraires à la doctrine certaine des auteurs. Les chapitres sont l’œuvre de ceux qui collationnèrent les centons. Ils furent construits en réunissant ce qui se ressemblait à peu près. Plusieurs furent mis dans un désordre complet, par l’accident qui brouilla tant de vieux écrits chinois, la rupture du lien d’une liasse de lattes, et le mélange de celles ci. — À noter que ces traités taoïstes ne furent point compris dans la destruction des livres, en 213 avant J. C.

La doctrine des trois auteurs est une. Lie-tzeu et Tchoang-tzeu développent Lao-tzeu, et prétendent faire remonter ses idées à l’empereur Hoang-ti, le fondateur de l’empire chinois. Ces idées sont, à très peu près, celles de l’Inde de la période contemporaine, l’âge des Upanishad. Un panthéisme réaliste, pas idéaliste. — Au commencement fut seul un être, non intelligent mais loi fatale, non spirituel mais matériel, imperceptible à force de ténuité, d’abord immobile, Tao le Principe, car tout dériva de lui. Un jour ce Principe se mit à émettre Tei sa Vertu, laquelle agissant en deux modes alternatifs yinn et yang, produisit comme par condensation le ciel, la terre et l’air entre deux, agents inintelligents de la production de tous les êtres sensibles. Ces êtres sensibles vont et viennent au fil d’une évolution circulaire, naissance, croissance, décroissance, mort, renaissance, et ainsi de suite. Le Souverain d’en haut des Annales et des Odes, n’est pas nié expressément, mais dégradé, annulé, si bien qu’il est nié équivalemment. L’homme n’a pas une origine autre que la foule des êtres. Il est plus réussi que les autres, voilà tout. Et cela, pour cette fois seulement. Après sa mort, il rentre dans une nouvelle existence quelconque, pas nécessairement humaine, même pas nécessairement animale ou végétale. Transformisme, dans le sens le plus large du mot. — Le Sage fait durer sa vie, par la tempérance, la paix mentale, l’abstention