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Ce texte est décisif pour la question de la croyance, dans l’antiquité chinoise, à la survivance des âmes. Il nous montre princes et peuple réunis dans un ciel empyrée, au courant des affaires de ce bas monde, s’y intéressant et y intervenant. Tous les Commentateurs ont reconnu la chose. Écoutons Tchou hi qui les résume tous, qui lui ne croyait pas à la survivance, et à qui la clarté de ce texte arracha les aveux suivants : « Il est indubitable que, avant la troisième dynastie, on considérait les défunts comme existants, comme vivants. De cette croyance découlait la crainte révérencielle de tous à l’égard des morts. Cette foi, ce culte, furent à leur apogée sous la deuxième dynastie. Voilà pourquoi, dans des conjonctures fort difficiles, P’an keng en appela, comme suprême argument, à ses ancêtres, aux ancêtres de ses ministres et de son peuple. Il le fit pour en imposer à leurs descendants. P’an keng leur parla de ses aïeux et des leurs, comme d’êtres existant réellement au dessus d’eux, pouvant les affliger et les punir, avec lesquels il entretenait des relations suivies et traitait des affaires courantes. En ce faisant, il profita d’une conviction alors générale et incontestée. Il tira parti de la foi profonde des hommes de la deuxième dynastie, dans la survivance des défunts. » (Lettres de Tchou hi.) Le même texte prouve de plus, que, sous la deuxième dynastie, les oracles rendus par la tortue, étaient considérés comme indubitables, et constituaient un puissant instrument de gouvernement.

E. En 1241, alors que les succès militaires de l’empereur Ou ting eurent donné à la deuxième dynastie quelque regain de popularité, plusieurs Odes furent composées, pour êtres chantées, ou dans le temple des Ancêtres, ou durant les banquets impériaux. J’en extrais les passages suivants : Jadis le Ciel fit descendre une hirondelle, et donna ainsi naissance à Sie. Le Souverain d’en haut voulut que ce sien fils, fût l’ancêtre de la future dynastie Chang. Durant les six siècles qui suivirent, les descendants de Sie n’ayant rien fait qui fût de nature à leur faire perdre le mandat du Souverain d’en haut, alors que T’ang était le chef de la maison de Chang, la destinée de cette maison se réalisa. T’ang ayant servi avec respect le Souverain d’en haut, le Souverain le proposa comme modèle à l’empire, en l’élevant sur le trône impérial. T’ang fut comblé des bienfaits et des faveurs du Ciel. A ce fils du Ciel fut accordé l’excellent ministre I yinn. (Odes, Huan niao, Tch’ang fa.) D’abord, une remarque : L’hirondelle dont il est question dans ce texte, laissa tomber un œuf dans la bouche de Kien ti, une femme mariée, qui conçut ainsi Sie l’ancêtre des Chang. Cette conception est attribuée à l’action du Ciel. Plusieurs clans anciens racontaient des légendes analogues, sur la naissance de leur premier ancêtre. Il paraît même que ce fut là la première origine des noms de clan, et de l’appellatif Fils du Ciel. Résumant ces légendes, le Chouo-wenn, la grande autorité en matière d’étymologie, explique ainsi le caractère sing, nom de clan : « Ce caractère se compose de femme et de naître ; car les hommes célèbres de l’antiquité naquirent, parce que leurs mères avaient subi l’influx du Ciel ; de là vient qu’on les appela Fils du Ciel. D’après la tradition,